Résumé :

Cet article développe le concept de « criminalisation de la séropositivité » par les systèmes judicaire et carcéral états-uniens. Alors que des juges ont eu tendance, dans certaines affaires, à considérer la séropositivité comme source de criminalité, le système carcéral, lui, a assujetti les prisonniers séropositifs à double peine en leur infligeant des traitements manifestement discriminatoires. L’article examine comment les prisonniers, avec le soutien d’activistes extérieurs, ont pu s’organiser pour améliorer la situation des séropositifs et favoriser l’éducation sur le VIH à l’intérieur du système carcéral.

 

Mots-clé : SIDA, mouvement social, criminalité, système judiciaire états-unien

 

Abstract: This article develops the concept of criminalization of seropositivity by the US judicial and prison systems. Whereas some judges have tended to consider seropositivity as source of criminality in certain cases, the prison system has subjected seropositive prisoners to double punishment, inflicting upon them glaringly discriminatory treatments. The article examines how prisoners, supported by external activists, have organized to improve the situation of seropositive individuals and champion HIV education within the prison system.

 

 

 

Introduction

Cet article développe le concept de  » criminalisation de la séropositivité « . Le concept de criminalisation avait déjà été développé par les criminologues critiques états-uniens (Messershmidt, 2000). Ce concept se réfère au processus par lequel le droit pénal est appliqué sélectivement à certaines conduites. Ce processus se découpe en trois étapes : 1) le passage de la loi qui interdit certains types de comportements ; 2) la surveillance de tels comportements et 3) la punition de ces comportements quand ils sont détectés. L’étude de la criminalisation, en tant que processus, est donc indispensable à l’étude du crime.

 

Le processus de criminalisation a fait l’objet de débats passionnés parmi les criminologues occidentaux. Les différents arguments évoqués soulèvent trois types de questions. D’abord, comment la criminalisation contribua-t-elle à l’émergence des sociétés industrielles au dix-septième siècle ? Deuxièmement, le processus de criminalisation est-il neutre ou sert-il les intérêts de groupes sociaux puissants? Troisièmement, le processus de criminalisation contribue-t-il au maintien de formes spécifiques contemporaines d’inégalités sociales par classe, sexe, race, âge, orientation sexuelle, et, pour le domaine qui nous intéresse, statut sérologique.

 

Selon certains criminologues, le processus de criminalisation aurait, depuis sa création, contribué, dans l’ensemble, à l’émergence d’une société occidentale moderne rationnelle et humaine. D’autres criminologues suggèrent, au contraire, que la criminalisation se serait subtilement constituée en arme de défense pour les intérêts de certains groupes puissants en société. Enfin, la troisième position, qui se situe entre les deux premières, suggère que, dans certains cas, la criminalisation serait le produit de luttes de pouvoir, dans d’autres, elle ne serait que marginalement liée à ces luttes de pouvoir, et enfin dans d’autres cas encore, la criminalisation transcenderait tout simplement ces luttes de pouvoir (Messerschmidt, 2000).

 

Criminalisation de la séropositivité

Le concept de criminalisation présuppose que la définition du crime n’est pas absolue et indiscutable, mais au contraire provient souvent d’un consensus social. Appliqué à la séropositivité, ce concept signifie que dans le système pénitentiaire et dans certaines parties du système judiciaire états-unien la majorité des autorités pensait, vers la fin des années 1980, que la séropositivité résultait de conduites socialement répréhensibles. La conséquence directe fut ce que certains appellent la  » double peine « , et que j’ai conceptualisée comme la  » criminalisation de la séropositivité « , c’est-à-dire l’état  » déclaré  » ou  » perçu  » de séropositivité équivaut à la commission d’un crime et est effectivement traité comme un crime en soi ou en sus d’un autre crime, menant à terme à des peines ou des traitements discriminatoires. Bien qu’il s’en inspire fortement, mon concept de criminalisation a un fondement plus social que celui énoncé par les criminologues critiques états-uniens, qui lui a un fondement plus légal.

 

Criminalisation par la justice

Ainsi, un certain nombre de juges ont infligé des peines plus lourdes aux individus séropositifs dans des affaires de morsures (National Bureau of Justice Report, 1989). Le juge John B. Mariano condamna Gregory Smith à 25 ans de prison pour avoir mordu un garde de prison. M. Smith, jeune homme noir, gay et séropositif, fut condamné pour  » tentative de meurtre « , bien que le juge eût lui-même reconnu que le VIH ne se transmet pas par morsure. Le juge déclara lors du procès qu’il voulait envoyer un message selon lequel :  » toute conduite criminelle de cette nature serait punie rapidement et sévèrement  » ( ACLU, 1989).

 

De 1989 à 1991, environ dix affaires identiques avaient été poursuivies en justice au cours desquelles des personnes vivant avec le SIDA reçurent de sévères condamnations pour avoir, selon les divers juges, attenté à la vie de policiers ou de gardiens de prison par morsure ou crachat. Curtis Weeks, un prisonnier du Texas reçut une peine de prison à vie pour avoir craché sur un gardien. Gregory Scroggins, un résident de Géorgie vivant avec le SIDA, fut accusé de violence aggravée et tentative de meurtre pour avoir mordu un policier pendant une arrestation. Après avoir délibéré pendant trois heures, le jury déclara la culpabilité de M. Scroggins, qui fut condamné à une peine de 10 ans de prison (ACLU, 1989).

 

Un autre cas impliqua un homme, Donald Haine, sur le point de se suicider. Alertés par des bruits étranges, les voisins appelèrent les policiers qui, après s’être introduits dans la maison, durent affronter physiquement Haine. L’un d’entre eux fut éclaboussé par le sang du suicidaire et accusa ce dernier de l’avoir exposé intentionnellement au virus. Haine reçut alors une peine de trente ans de prison (ACLU, 1989).

 

Etrangement, ces verdicts ignoraient une étude scientifique conduite en 1990 par les Centers for Disease Control (CDC), dont l’objectif était d’examiner la transmission du VIH par morsure. L’échantillon utilisé incluait 89 membres de familles et bien que nombre d’enfants eussent mordu frères et sœurs non infectés ainsi que d’autres membres de la famille, il n’y eut aucune transmission du virus (Centers for Disease Control, 1990). De même, selon l’étude du National Institute of Justice sur le SIDA dans le système carcéral, aucun gardien de prison et policier n’avait jamais contracté le VIH lors d’un contact avec des personnes séropositives (National Institute of Justice, 1989).

Criminalisation dans le système carcéral

Vers la fin des années 1980, l’Etat de New York était détenteur du plus grand nombre de prisonniers et du plus grand nombre de prisonniers infectés du pays: environ 10 000 des 54 000 prisonniers incarcérés dans ces prisons étaient atteints de SIDA (National Bureau of Justice Report, 1989). Près de 90% des prisonniers séropositifs étaient noirs ou latinos. Cependant, l’Etat de New York n’avait toujours pas de programme intégré de traitement et de prévention ; alors que 140 000 personnes environ passaient par le système pénitentiaire chaque année, deux à six pour cent d’entre elles étaient infectées, le taux d’infection de la population générale étant de 0,10 pour cent (Sentencing Project, Annual Report, 1989). Potentiellement, ce qui expliquait cette différence était que les rapports sexuels en milieu carcéral étant considérés comme un délit, de nombreux Etats refusaient de distribuer des préservatifs aux prisonniers, bien que les autorités fussent conscientes que de tels rapports sexuels avaient bien lieu au sein des prisons. De même, la possession de seringues était illégale en prison, mais l’utilisation de drogues y était tout aussi fréquente sans que les prisonniers eussent accès aux produits nettoyants

 

Durant l’été 1987, le Président Reagan signa un décret exigeant que les prisonniers fédéraux soient testés pour le VIH et que le nom de ceux dont le résultat était positif soit communiqué à l’Administration Municipale de la Santé. Dix-sept Etats avaient institué le dépistage obligatoire des prisonniers et cinq y avaient ajouté la ségrégation des prisonniers séropositifs (National Bureau of Justice Report, 1987). Ainsi, les prisonniers porteurs du VIH, relégués dans des cellules spéciales, étaient souvent maltraités par le personnel. Qu’il fût sécuritaire, médical ou civil, ce personnel était souvent ignorant ou non respectueux des lois relatives à la confidentialité censées protéger les porteurs de VIH. En conséquence, il n’était pas rare que certains prisonniers retrouvent quelquefois leurs effets personnels ou leur matelas brûlé. En Alabama, en réponse à une action judiciaire collective entamée par l’American Civil Liberties Union (ACLU), 7000 prisonniers non infectés avaient signé une pétition pour que fût maintenu le Dortoir 7, où étaient relégués les prisonniers malades du SIDA, qui se voyaient souvent refuser l’accès à la bibliothèque, les heures de visites et les privilèges religieux.

 

Criminalisation par faute de soins

Les soins médicaux apportés aux prisonniers étaient minimes, l’Etat de New York ne dépensant que 1500 dollars en soins médicaux par prisonnier et par an, c’est-à-dire la moitié du montant alloué par l’état de la Californie. Dans de nombreux cas, les prisonniers se voyaient tout simplement refuser les soins médicaux ; ainsi, des 7000 prisonniers de l’Etat de New York qui avaient besoin de soins médicaux à tout moment, moins de 1500 recevaient des soins pour des maladies associées au SIDA. Ce fait peut en partie expliquer le fort taux de mortalité au sein des prisons, 331 pour 100 000, alors que le taux de mortalité parmi la population générale de l’Etat de New York était de 20 pour 100 000 (National Bureau of Justice Report, 1988).

 

Alors que 60 à 70% des 54 000 prisonniers de l’Etat de New York avaient un passé de toxicomanie, les prisonniers ayant contracté le VIH par voie intraveineuse survivaient deux fois moins longtemps que ceux qui n’étaient pas prisonniers (National Bureau of Justice Report, 1988). La progression du SIDA était la plus rapide chez les femmes noires et latino-américaines. De plus, une étude de 1987 révélait qu’au moins 25% des décès dus au SIDA n’avaient été diagnostiqués qu’au moment de l’autopsie (National Bureau of Justice Report, 1988).

 

Activisme de l’intérieur, activisme de l’extérieur

Bien que New York eût rendu l’éducation sur le SIDA obligatoire pour les prisonniers depuis 1984, les informations que ces derniers recevaient étaient incomplètes. De nombreuses manifestations furent organisées par des activistes qui travaillaient avec des personnes incarcérées. En 1988, à Bedfort Hills Correctional Facility, la prison de haute sécurité pour femmes de New York, les prisonnières décidèrent d’organiser le Programme d’Education et de Soutien sur le SIDA (ACE). Malgré leur statut de prisonnières, certaines femmes reçurent la permission d’éduquer d’autres femmes sur le SIDA.

 

D’autres prisonniers suivirent leur exemple. Les programmes COPE (faire face) de Staten Island et de Fishkill furent établis sur des critères similaires par des prisonniers pour des prisonniers. Le National Assocation for the Advancement of Colored People (NAACP), l’organisation afro-américaine la plus importante aux Etats-Unis, organisa un groupe d’éducation sur le SIDA à Sing Sing, une des prisons de la ville de New York.

 

En 1991, un activisme en faveur des prisonniers et du SIDA avait commencé à se développer. Neuf Jours d’Action – une manifestation massive que les activistes avaient organisée pour dénoncer toutes les carences institutionnelles en matière de SIDA – avait déjà ciblé la question du VIH dans les prisons. Les activistes, qui comptaient parmi eux d’anciens prisonniers se rendirent à Harlem pour y dénoncer la situation des prisonniers vivant avec le SIDA.

 

En mai 1991, ACT UP/Ithaca et ACT UP/NY organisèrent une manifestation conjointe devant le responsable des prisons auprès de l’Etat de New York, l’institution suprême qui régit le système pénitentiaire situé à Albany. « Les prisonniers avec le VIH et le SIDA ne devraient pas être punis pour un crime qu’ils n’ont pas commis. Le SIDA est une maladie qui doit être traitée et évitée, pas un crime punissable  » ; telle était l’information que les activistes donnaient aux journalistes. Une de leurs pancartes annonçait :  » L’administrateur général des prison, Thomas A. Coughlin III, le Chief Medical Officer Robert Greifinger et Mario Cuomo, Gouverneur de l’Etat de New York, sont ceux qui ont besoin de correction « .

 

Quelques centaines d’activistes participèrent à la manifestation, mettant en scène un procès en cour d’assises du Responsable des Prisons. Ils demandaient l’amélioration de l’accès aux traitements, la création de centres de dépistage anonymes, la mise en place d’entretiens avec des professionnels avant et après le test, et celle d’une éducation respectueuse de la culture des prisonniers. Ils demandaient aussi que les préservatifs fussent rendus disponibles pour hommes et pour femmes, des produits pour nettoyer les seringues, la représentation des prisonniers dans les comités concevant les essais expérimentaux et l’accès aux Programmes de Réunions de Familles pour les prisonniers séropositifs. Ces programmes permettraient aux prisonniers de passer 48 heures avec leur famille dans un emplacement situé à l’intérieur de la prison, mais hors du bâtiment principal. Soutenus par la Commission Nationale sur le SIDA, certains de ces programmes furent mis à la disposition des prisonniers atteints.

 

Une deuxième manifestation fut organisée par le Comité des Prisonniers d’ACT UP en collaboration avec Harlem/Sand Up le 9 juillet 1991 devant le bâtiment officiel du Département des Services Correctionnels (DOCS) à Harlem.  » Les prisonniers avec le SIDA ne sont pas des vacanciers vivant aux frais de la société, c’est la société qui est un danger pour eux; donnez aux prisonniers le choix, la liberté de traitement, la liberté d’information, la liberté de survivre  » scandaient les activistes. Le DOCS avait la charge de la plus importante population de prisonniers aux USA. Le seul traitement disponible derrière les barreaux était l’AZT, un médicament aux effets encore toxiques et dont l’efficacité n’avait pas encore été totalement démontrée.

La même année, les activistes inondèrent de lettres la législature de l’Etat de New York et en saturèrent la ligne téléphonique, afin d’exprimer leur soutien a un projet de loi qui octroierait la liberté conditionnelle aux prisonniers atteints du SIDA. Probablement influencé par ces manifestations de soutien, le gouverneur de New York, accorda la clémence à une prisonnière et à un prisonnier, tous deux atteints du SIDA.

Par la suite, les activistes constituèrent une coalition qui existe encore aujourd’hui : L’alliance Pour Les Prisonniers. L’un de ses objectifs était de créer un répertoire des organisations qui viennent en aide aux prisonniers, y compris ceux qui sont en liberté conditionnelle. Un autre objectif était de créer un cursus d’éducation sur le SIDA, une bibliothèque d’information, des stratégies politiques, et des recommandations destinées aux politiciens de la ville et de l’Etat de New York afin d’améliorer la situation des prisonniers.

 

La criminalisation est toujours d’actualité

Malgré les gains impressionnants accumulés par les activistes, ces derniers sont toujours confrontés à un système pénitentiaire profondément inégalitaire. Depuis 1991, le taux de personnes vivant avec le SIDA dans les prisons a toujours été supérieur à celui de la population générale (Bureau of Justice Statistics, 2004).

 

Au 31 décembre 2001, 2% des individus incarcérés dans des prisons d’états et 1,2% des individus incarcérés dans des prisons fédérales étaient séropositifs. La majorité était concentrée dans les mêmes états, et les prisons new-yorkaises détenaient toujours le plus grand nombre d’individus séropositifs et avec un diagnostic de SIDA. Les femmes incarcérées accusaient un taux de séropositivité (2,9%) plus élevés que les hommes (1,9%) (Federal Bureau of Prisons, 2004).

 

L’Office of National Drug Control Policy annonçait en 2001 que l’utilisation de drogues par injection était en décroissance à l’intérieur des prisons, mais que les conditions d’utilisation étaient toujours dangereuses, car un quart des prisonniers utilisait des seringues usagées, et la moitié consommait en groupes. Seuls 20% des prisons mettaient les produits nettoyants et stérilisants à la disposition des prisonniers (Office of National Drug Control Policy, 2004). Le Federal Bureau of Prisons annonçait que jusqu’à 30% des prisonniers se livraient à des rapports homosexuels. Il révélait aussi qu’entre un à trois et un à dix prisonniers se faisait agressé sexuellement dans le système pénitentiaire états-unien. Cependant 4% des prisons seulement, précisément les prisons de New York, Washington D.C., San Francisco et Philadelphie, mettaient les préservatifs à la disposition des détenus. De tous les systèmes pénitentiaires, 10% seulement permettaient la distribution de préservatifs (Federal Bureau of Prisons, 2004).

 

Par ailleurs les Noirs et Latinos, les groupes les plus pauvres aux Etats-Unis, ont aujourd’hui une probabilité d’être incarcérés plus grande que tout autre groupe ethnique. Approximativement, 75% des détenus sont des Latino-américains ou des Afro-américains. Un jeune Noir sur quatre et un jeune Latino sur dix est aujourd’hui derrière les barreaux aux Etats Unis (National Institue of Justice, 2004).

 

Les femmes afro-américaines ou latino-américaines représentent 60% de la population féminine incarcérée. Si les Afro-américains en général ont une probabilité dix fois plus grande que les Caucasiens d’être infectés par le VIH, les femmes incarcérées ont, elles, une probabilité trois fois plus grande que les hommes d’avoir un diagnostic de SIDA. Dans la population générale ces taux sont renversés : les homme ont une probabilité trois fois plus grande que les femmes d’avoir un diagnostic de SIDA. Un tiers des femmes incarcérées utilise des drogues par injection (National Institute of Justice, 2004).

 

Un des effets de la politique punitive du gouvernement états-unien à l’égard des petits usagers de drogues est que les Noirs et les Latino-américains ont une probabilité plus grande d’être incarcérés pour des délits liés à la possession et au trafic de drogues. Pour les mêmes délits, ils reçoivent en général des peines plus longues que les Blancs. En 1986, avant que les peines pour possession de crack n’eussent été votées, la durée moyenne des peines infligées aux Noirs était de 11% supérieure à celle des Blancs. Quatre ans après la mise en application de ces peines, la durée moyenne que les Noirs devaient passer derrière les barreaux était de 49% supérieure à celle des Blancs. En 1989, environ 80% des crimes étaient liés à la drogue (Meierhoefer, 1992).

 

Conclusion

Les activistes engagés dans le mouvement des prisonniers contre le SIDA se sont vus confronter à plusieurs questions d’ordre culturel et structurel. Sur le plan identitaire, ce mouvement social a démontré que des personnes derrière des barreaux pouvaient se constituer en activistes conscients de ce que pouvait représenter le SIDA dans les prisons. En dénonçant la résistance des autorités carcérales à reconnaître l’existence de pratiques sexuelles et d’injection de drogues dans les prisons, les activistes incarcérés, avec l’aide d’activistes extérieurs, ont pu créer des programmes d’éducation pour les prisonniers. Sur un plan culturel, les activistes ont décrié la façon dont certains juges ont eu tendance á  » criminaliser  » la séropositivité en infligeant des peines  » exemplaires « .

Les personnes incarcérées, atteintes du SIDA principalement par voie intraveineuse, sont donc aux prises avec un système de justice qui leur a été triplement préjudiciable. Premièrement, la politique coercitive du gouvernement à l’égard des petits usagers a rendu les toxicomanes à bas revenu particulièrement vulnérables à l’incarcération ; deuxièmement, bien avant l’épidémie du SIDA, les Noirs et les Latino-américains avaient déjà une probabilité plus grande d’être incarcérés que les Blancs, et troisièmement, les innombrables préjugés associés à la maladie du SIDA ont eu un effet multiplicateur sur les deux premiers types d’injustice.

 

Sur le plan institutionnel, même s’ils n’ont pu à eux seuls révolutionner un système profondément discriminatoire, les activistes ont contribué à créer des programmes d’éducation au sein des prisons et à rendre les médicaments disponibles. Au niveau de la production du savoir, ils ont montré que l’utilisation des données scientifiques est souvent traversée de préjugés, ainsi que l’illustrent les verdicts rendus par divers juges. Ces derniers ont pendant longtemps persisté à  » criminaliser  » la séropositivité en infligeant des peines extrêmement sévères dans des affaires de morsures, même s’ils reconnaissaient, dans certains cas, que le VIH ne se transmet pas par cette voie.

 

 

 

Références Bibliographiques

ACLU, HIV and Prison, Annual Report, 1989.

Bureau of Justice Statistics, Annual Report, 2004.

Centers for Disease Control, AIDS Surveillance Report, 1990.

Federal Bureau of Prisons, Annual Report, 2004.

Meierhoefer, Barbara S., The General Effect of Mandatory Minimum Prison Terms: A Longitudinal Study Of Federal Sentences Imposed (Washington DC: Federal Judicial Center, 1992), p. 20.

Messershmidt, J. 2003. Criminology, Westview.

National Bureau of Justice Report, 1989.

National Bureau of Justice Report, 1988.

National Bureau of Justice Report, 1987.

Office of National Drug Control Policy, Annual Report, 2004.

Sentencing Project, Annual Report, 1989.