Vient de paraître : de Martine ARINO:  La Subjectivité du chercheur en sciences sociales.

Martine Arino est un membre très actif du comité scientifique d’Esprit Critique, docteur en Sciences de l’information et de la Communication, sémioticienne, enseignante au département de sociologie à l’Université de Perpignan, et membre du groupe de recherche SEMIOCOM et du VECT axe IV b, dynamique sociale et pratiques culturelle/Université de Perpignan via Domitia.

Au carrefour de la sociologie, des sciences de la communication et de l'éducation, notre collègue et amie Martine Arino, sur la base de ses travaux de thèse, (voir le numéro d'Esprit Critique du printemps 07 consacré à l'implication), fait le point sur une piste originale de la recherche et des méthodologies dites « sensibles » et transversales. Le paradoxe de son traitement d'un sujet difficile et controversé étant qu'elle y apporte une rigueur jamais démentie servie par une érudition sans faille. Incontestablement un travail de pionnière qui contribue à ouvrir des nouvelles portes dans le prolongement des travaux d'un Lourau ou d'un Pierce.

 

« Le rapport du chercheur à son objet d’étude dans l’acte de connaissance, écrit-elle,  est dominé par deux couples de concepts intimement liés : distanciation et implication d'une part, explication et compréhension d'autre part. L’explication propose une connaissance analytique bâtie à l'aide de formalismes bien définis et de moyens quantitatifs ouvrant sur des possibilités de réfutabilité et de falsifiabilité. Elle présuppose la distanciation du chercheur, garante d'une attitude critique et objective. En revanche, dans la vision compréhensive c'est la totalisation, la connaissance synthétique atteinte par les voies subjectives du vécu personnel et de l’empathie qui dominent.

Elle présuppose l'implication du chercheur, garante de la précision et de l'exhaustivité du savoir. La science positive s'est bâtie (Descartes) sur l'explication et l'idéal de la connaissance scientifique a été incarné par le déterminisme absolu  » tel effet – telle cause  » (Laplace).

Cependant, de nos jours, on parle de Sciences Exactes et Expérimentales ou  » Sciences dures  » et de Sciences Humaines et Sociales ou  » Sciences molles « . Chaque monde semble clos sur lui-même. Devant le succès des Sciences  » dures « , les Sciences  » molles  » ont été tentées d'importer les méthodologies de ces dernières, le plus souvent de façon aveugle en oubliant notamment de réviser à cette occasion la position du chercheur vis-à-vis de l'objet de connaissance. Cela a engendré le développement de la démarche explicative dans les Sciences Humaines et la transformation du sujet en objet. Du même coup le savoir s’est atomisé en disciplines.

En réaction, à cette évolution des Sciences Sociales, nous avons vu apparaître des courants post-modernistes fondés sur la compréhension. Leurs tenants ont au départ pour hypothèse qu'il n'existe pas de  » vérité  » connaissable. La compréhension, en incluant le chercheur, particularise et  » intimise  » un savoir dès lors peu communicable, difficilement réfutable et encore moins falsifiable (croyances,  » sciences  » non fondées en raison comme l'astrologie par exemple, etc.…)

La distanciation associée à l'explication d'une part et l'implication associée à la compréhension d'autre part apparaissent comme deux pôles opposés dans le processus d'élaboration de la connaissance. »

 Cet ouvrage s’inscrit dans le champ de la sociologie des systèmes de pensée et donc de production des connaissances. Il propose une méthodologie fondée sur la sémiotique visant élucider, à travers le champ des possibles, une objectivation du chercheur pris dans la dialectique objectivité et subjectivité. Le modèle construit à la lumière de la sémiotique peircienne crée un savoir profondément pragmatique, car il s’efforce de prendre en compte ses effets pratiques sur ceux-là mêmes – les chercheurs – qui tentent de le produire. Il permet d’analyser la subjectivité comme tension vers l’objectivité et, de ce point de vue, sciences sociales et sciences exactes sont logées à la même enseigne. Ce livre peut intéresser aussi bien les chercheurs en sciences exactes qu’en sciences humaines.

 

 

Table des matières

Introduction – Situation problématique et problématique de la situation

PREMIÈRE PARTIE – Sciences de l’Information et de la Communication, Sociologie de la Communication et Sémiotique : que peuvent s’apporter ces trois disciplines

1)  » La nouvelle communication « 

2) Gregory Bateson et les prémices de la  » nouvelle communication « 

3)  » La théorie des types logiques  » entre apprentissage et contexte

4) La communication dépend de son contexte

5) Les prémisses de la notion d’observateur en communication

6) Les quatre niveaux d’interaction de Ruesch et Bateson

7) Les prémisses d’une nouvelle communication chez Bateson

8) Birdwhistell et la tradition anthropologique

9) L’  » analyse contextuelle  » d’Albert Scheflen

10) E. T. Hall et la proxémique

11) Dell Hymes et l’ethnographie de la communication

12) P. Watzlawick, J. Helmick Beavin, D. D. Jackson et Une logique de la communication

13) L’étude de la pragmatique de la communication

14) Le cadre de la référence

15) Pour une axiomatique de la communication

16) Le développement de la métaphore de l’orchestre

17) Yves Winkin et l’anthropologie de la communication

18) Les théories structurales de la communication

19) Roland Barthes et la sémiologie

20) Algirdas-Julien Greimas et  » le carré sémiotique « 

21) La critique du modèle

22) La sémio-pragmatique, une nouvelle communication ?

23) Le travail de l’ethnométhodologie : un sémioticien qui s’ignore

 

DEUXIÈME PARTIE – Modélisation sémiotique de l’implication

1) La phénoménologie

2) Les catégories phénoménologiques peirciennes

3) Méthode d’analyse du phanéron : la méthode d’abstraction prescisive

4) La phénoménologie peircienne

5) Les trois catégories et leurs rapports avec les monades, dyades et triades

6) Analyse phénoménologique des définitions de l’implication : les trois modes d’être de l’implication

7) Les différents niveaux phénoménologiques de l’implication

8) L’implication psycho-affective (désir)

9) La priméité de l’implication est le désir d’en savoir plus sur l’objet

10) L’implication structuro-groupale (la présence de l’individu ici et maintenant dans un groupe)

11) Comment résoudre cette complexité qui s’offre aux chercheurs ?

12) La socioanalyse et l’implication

13) L’implication institutionnelle (éthos et habitus de classe, praxis et projet existentiels)

14) Institution et implication

15) La dialectique de l’institution selon Cornélius Castoriadis

16) L’institution dialectisée selon R. Lourau

17) L’implicite du champ de l’institution : l’implication

18) Implication versus engagement : implication réflexive

19) Tenir les trois niveaux ensemble – le nœud borroméen de l’implication

20) La triade fondamentale de l’implication dans le processus de connaissance

 

TROISIÈME PARTIE – Architectonique de l’implication

1) Le signe

2) Signe ou représentation ?

3) Les caractéristiques du signe peircien

4) La société est informée par les formes dominantes : la détermination Signe-Objet

5) Le recollement des structures objectives et structures subjectives ; la liaison triadique, nœud de l’implication

6) La sémiosis

7) L’action d’un signe ou la sémiosis, un processus institutionnel

8) La classification du signe triadique : les trichotomies de l’objet, du signe, de l’interprétant

9) Le treillis du signe triadique

10) Le treillis de l’implication

11) Objet dynamique – Objet immédiat : L’Oi  » dans le signe  » et l’Od  » hors signe « 

12) La trichotomie du processus d’interprétation

13) Production et Interprétation de l’implication

14) Les différentes inférences et les parcours de l’implication

15) Abduction et transduction

16) Qu’est-ce qui fait la validité d’un argument abductif ?

Conclusion Peut-on conclure sur l’implication ?

Bibliographie.

Sémantiques

 

ISBN : 978-2-296-04523-1, 224 pages, L’Harmattan.